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Message par Invité Mer 20 Mai 2020 - 12:14

Un contemporain... Eugène Pottier (un recueil)


CASERNE ET FORÊT

A Paul AVENEL (Lice chansonnière)

    J'espérais à Fontainebleau
Savourer les bois solitaires,
Mais par malheur ce lieu si beau
    Grouille de militaires.

Parmi la feuille et le granit,
Dès l'aube en soldat malhonnête
Réveille l'oiseau dans son nid,
    Au son de la trompette.

Le silence étend son velours
Dans le creux d'un vallon sauvage ;
Mais sur les rochers, des tambours
    Font leur apprentissage.

Refaisant le monde et chantant
L'avenir large et l'espérance,
On s'éveille en sursaut, heurtant
    Un pantalon garance.

Puant fort le vin et l'amour,
Des femmes à soldats font tache
Sur des prés où jusqu'à ce jour
    J'ai vu paître la vache.

Ne pourrions-nous pas - en secret -
Sans nuire au pouvoir qui gouverne,
Une nuit porter la forêt
    Bien loin de la caserne ?...


A Fontainebleau — Août 1867


La lice chansonnière:

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Message par Sarty Mer 20 Mai 2020 - 21:21

Spoiler:


Dernière édition par Chine le Mer 26 Aoû 2020 - 23:46, édité 1 fois
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Message par Basilice Mer 20 Mai 2020 - 22:36

Arbres

Chevaux sauvages et sages
A la crinière verte
Au grand galop discret
Dans le vent vous piaffez
Debout dans le soleil vous dormez
Et rêvez.

Jacques Prévert
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Message par MoojiKadja Dim 24 Mai 2020 - 16:18

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Message par Invité Dim 24 Mai 2020 - 18:16

Roger Notoire (2330-2431)

Je naquis sans savoir un mot,
à quinze ans j'en savais dix mille,
et n'étais pas plus avancé.  

A vingt ans j'en savais cent mille
mais je n'y comprenais rien,
sauf aux cris.  

A trente ans j'appris à hurler
quand je me sentis coupé
en deux mais toujours entier.

A quarante ans,
grâce à la patience de mes maîtres,
j'appris à dire quelques mots.  

A soixante ans je m'entourai
d'un rempart de discours
pour protéger mon silence.

A quatre-vingts ans,
à mes quatre-vingts petits enfants
je racontai six cent quarante mille histoires.  

A cent ans je fis mes bagages,
mis la clef sous le paillasson
et dis : bonsoir, la compagnie

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Message par Invité Mar 2 Juin 2020 - 3:27

Si tu dois m'aimer, que ce soit pour rien,
sinon pour l'amour lui-même. Ne dis pas
"Je l'aime pour son sourire...son allure...sa façon
douce de parler, pour son esprit malin
qui s'accorde au mien et m'apporte
le bien-être exquis de tel jour. "
Car ces choses en soi, Aimé, peuvent
changer ou changer pour toi _et l'amour, ainsi tissé
peut se dénouer de même. Ne m'aime pas
pour les larmes qui coulent sur mes joues.
Elle pourrait oublier de pleurer, celle qui jouit
longtemps de ta présence, et ainsi perdre ton amour!
Mais aime-moi pour l'amour, pour aimer toujours,
dans l'éternité de l'amour.



- Elisabeth Barrett Browning

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Message par Invité Mar 2 Juin 2020 - 3:38

Toute chose, tout être
est une outre emplie de merveilles.

Sois connaisseur,
goûte avec délicatesse.

Tout vin peut t’élever
choisis comme un roi, choisis le plus pur.


- Rûmî

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Message par Sarty Mar 2 Juin 2020 - 13:27

Ces mille questions
    Qui se ramifient
N'amènent, au fond,
Qu'ivresse et folies ;
Reconnais ce tour
Si gai, si facile :
Ce n'est qu'onde, flore,
Et c'est ta famille !
Puis elle chante. Ô
Si gai, si facile,
Et visible à l’œil nu...
- Je chante avec elle -
Reconnais ce tour
Si gai, si facile,
Ce n'est qu'onde, flore,
Et c'est ta famille !... etc...

Rimbaud, Fêtes de la patience, IV
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Message par Invité Ven 12 Juin 2020 - 22:54

je suis...
mes ailes ?
deux pétales pourris
ma raison?
des petits verres de vin aigre
ma vie ?
un vide bien pensé
mon corps
une entaille sur la chaise
mon va-et-vient ?
un gong enfantin
mon visage ?
un zéro dissimulé
mes yeux?
ah! des morceaux d’infini

Au centre du poème il y a un autre poème,
au centre du centre il y a une absence,
au centre de l’absence il y a mon ombre.

Ivre du silence
des jardins abandonnés
ma mémoire s'ouvre et se ferme
comme une porte au vent

Alejandra Pizarnik

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Message par St'ban Ven 12 Juin 2020 - 23:03



"Dans la maison blanche se meurt
la perdition des hommes.
Cent pouliches caracolent
Leurs cavaliers sont morts.
Et sous la palpitante
constellation des lampes,
tremble sa jupe moirée
entre ses cuisses de bronze.
Cent pouliches caracolent.
Leurs cavaliers sont morts.
De longues ombres affilées
viennent du trouble horizon
et le bourdon d'une guitare
se rompt.
Cent pouliches caracolent.
Leurs cavaliers sont morts."

Federico Garcia Lorca
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Message par Invité Ven 19 Juin 2020 - 2:14

J'ai avalé une fameuse gorgée de poison. - Trois fois béni soit le conseil qui m'est arrivé ! - Les entrailles me brûlent. La violence du venin tord mes membres, me rend difforme, me terrasse. Je meurs de soif, j'étouffe, je ne puis crier. C'est l'enfer, l'éternelle peine ! Voyez comme le feu se relève ! Je brûle comme il faut. Va, démon !

J'avais entrevu la conversion au bien et au bonheur, le salut. Puis-je décrire la vision, l'air de l'enfer ne souffre pas les hymnes ! C'était des millions de créatures charmantes, un suave concert spirituel, la force et la paix, les nobles ambitions, que sais-je ?

Les nobles ambitions !

Et c'est encore la vie ! - Si la damnation est éternelle ! Un homme qui veut se mutiler est bien damné, n'est-ce pas ? Je me crois en enfer, donc j'y suis. C'est l'exécution du catéchisme. Je suis esclave de mon baptême. Parents, vous avez fait mon malheur et vous avez fait le vôtre. Pauvre innocent ! - L'enfer ne peut attaquer les païens. - C'est la vie encore ! Plus tard, les délices de la damnation seront plus profondes. Un crime, vite, que je tombe au néant, de par la loi humaine.

Tais-toi, mais tais-toi !... C'est la honte, le reproche, ici : Satan qui dit que le feu est ignoble, que ma colère est affreusement sotte. - Assez !... Des erreurs qu'on me souffle, magies, parfums faux, musiques puériles. - Et dire que je tiens la vérité, que je vois la justice : j'ai un jugement sain et arrêté, je suis prêt pour la perfection... Orgueil. - La peau de ma tête se dessèche. Pitié ! Seigneur, j'ai peur. J'ai soif, si soif ! Ah ! l'enfance, l'herbe, la pluie, le lac sur les pierres, le clair de lune quand le clocher sonnait douze... le diable est au clocher, à cette heure. Marie ! Sainte-Vierge !... - Horreur de ma bêtise.

Là-bas, ne sont-ce pas des âmes honnêtes, qui me veulent du bien... Venez... J'ai un oreiller sur la bouche, elles ne m'entendent pas, ce sont des fantômes. Puis, jamais personne ne pense à autrui. Qu'on n'approche pas. Je sens le roussi, c'est certain.

Les hallucinations sont innombrables. C'est bien ce que j'ai toujours eu : plus de foi en l'histoire, l'oubli des principes. Je m'en tairai : poètes et visionnaires seraient jaloux. Je suis mille fois le plus riche, soyons avare comme la mer.

Ah ça ! l'horloge de la vie s'est arrêtée tout à l'heure. Je ne suis plus au monde. - La théologie est sérieuse, l'enfer est certainement en bas - et le ciel en haut. - Extase, cauchemar, sommeil dans un nid de flammes.

Que de malices dans l'attention dans la campagne... Satan, Ferdinand, court avec les graines sauvages... Jésus marche sur les ronces purpurines, sans les courber... Jésus marchait sur les eaux irritées. La lanterne nous le montra debout, blanc et des tresses brunes, au flanc d'une vague d'émeraude...

Je vais dévoiler tous les mystères : mystères religieux ou naturels, mort, naissance, avenir, passé, cosmogonie, néant. Je suis maître en fantasmagories.

Écoutez !...

J'ai tous les talents ! - Il n'y a personne ici et il y a quelqu'un : je ne voudrais pas répandre mon trésor. - Veut-on des chants nègres, des danses de houris ? Veut-on que je disparaisse, que je plonge à la recherche de l'anneau* ? Veut-on ? Je ferai de l'or, des remèdes.

Fiez-vous donc à moi, la foi soulage, guide, guérit. Tous, venez, - même les petits enfants, - que je vous console, qu'on répande pour vous son coeur, - le coeur merveilleux ! - Pauvres hommes, travailleurs ! Je ne demande pas de prières ; avec votre confiance seulement, je serai heureux.

- Et pensons à moi. Ceci me fait peu regretter le monde. J'ai de la chance de ne pas souffrir plus. Ma vie ne fut que folies douces, c'est regrettable.

Bah ! faisons toutes les grimaces imaginables.

Décidément, nous sommes hors du monde. Plus aucun son. Mon tact a disparu. Ah ! mon château, ma Saxe, mon bois de saules. Les soirs, les matins, les nuits, les jours... Suis-je las !

Je devrais avoir mon enfer pour la colère, mon enfer pour l'orgueil, - et l'enfer de la caresse ; un concert d'enfers.

Je meurs de lassitude. C'est le tombeau, je m'en vais aux vers, horreur de l'horreur ! Satan, farceur, tu veux me dissoudre, avec tes charmes. Je réclame. Je réclame ! un coup de fourche, une goutte de feu.

Ah ! remonter à la vie ! Jeter les yeux sur nos difformités. Et ce poison, ce baiser mille fois maudit ! Ma faiblesse, la cruauté du monde ! Mon Dieu, pitié, cachez-moi, je me tiens trop mal ! - Je suis caché et je ne le suis pas.

C'est le feu qui se relève avec son damné.


Arthur Rimbaud - Nuit de l'enfer



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Message par Invité Ven 19 Juin 2020 - 8:46

Charles Baudelaire a écrit:
Alchimie de la Douleur

L'un t'éclaire avec son ardeur,
L'autre en toi met son deuil, Nature !
Ce qui dit à l'un : Sépulture !
Dit à l'autre : Vie et splendeur !

Hermès inconnu qui m'assistes
Et qui toujours m'intimidas,
Tu me rends l'égal de Midas,
Le plus triste des alchimistes ;

Par toi je change l'or en fer
Et le paradis en enfer ;
Dans le suaire des nuages

Je découvre un cadavre cher,
Et sur les célestes rivages
Je bâtis de grands sarcophages.

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Message par Invité Ven 19 Juin 2020 - 8:49

Marguerite Yourcenar a écrit:
Ceux qui nous attendaient

Ceux qui nous attendaient, se sont lassés d’attendre,
Et sont morts sans savoir que nous allions venir,
Ont refermé leurs bras qu’ils ne peuvent plus tendre,
Nous léguant un remords au lieu d’un souvenir.
Les prières, les fleurs, le geste le plus tendre,
Sont des présents tardifs que rien ne peut bénir;
Les vivants par les morts ne se font pas entendre;
La mort, quand vient la mort, nous joint sans nous unir.
Nous ne connaîtrons pas la douceur de leurs tombes.
Nos cris, lancés trop tard, se fatiguent, retombent,
Pénètrent sans écho la sourde éternité;
Et les morts dédaigneux, ou forcés de se taire,
Ne nous écoutent pas, au seuil noir du mystère,
Pleurer sur un amour qui n’a jamais été.

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Message par Kafka Mar 23 Juin 2020 - 1:48

Ses purs ongles très haut dédiant leur onyx,
L'Angoisse, ce minuit, soutient, lampadophore,
Maint rêve vespéral brûlé par le Phénix
Que ne recueille pas de cinéraire amphore

Sur les crédences, au salon vide : nul ptyx
Aboli bibelot d'inanité sonore,
(Car le Maître est allé puiser des pleurs au Styx
Avec ce seul objet dont le Néant s'honore.)

Mais proche la croisée au nord vacante, un or
Agonise selon peut-être le décor
Des licornes ruant du feu contre une nixe,

Elle, défunte nue en le miroir, encor
Que, dans l'oubli fermé par le cadre, se fixe
De scintillations sitôt le septuor.


Mallarmé, Sonnet en X
Pas un choix très original mais j'aime beaucoup ce poème en dépit de sa nébulosité.


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Message par Invité Mer 1 Juil 2020 - 14:01

Théodore de Banville a écrit:
La Vie et la Mort

J’ai vu ces songeurs, ces poètes,
Ces frères de l’aigle irrité,
Tous montrant sur leurs nobles têtes
Le signe de la Vérité.

Et près d’eux, comme deux statues
Qui naquirent d’un même effort,
Se tenaient, de blancheur vêtues,
Deux vierges, la Vie et la Mort.

J’ai vu le mendiant Homère,
Le grand Eschyle au cœur sans fiel,
Chauve, et dans sa vieillesse amère
Insulté par le vent du ciel;

J’ai vu le lyrique Pindare,
L’élève divin de Myrtis
Dont un roi prenait la cithare,
Comme le chevreau broute un lys;

J’ai vu mon père Aristophane
Blessé par des mots odieux,
Et devant le peuple profane
Défendant Eschyle et ses Dieux;

J’ai vu buvant la sombre lie
De ses calices triomphants,
Sophocle, accusé de folie
Et maltraité par ses enfants;

J’ai vu portant l’affreux stigmate,
Ovide fugitif, buvant
Le lait d’une jument sarmate
Au désert glacé par le vent;

J’ai vu Dante en exil, et Tasse
Abandonné par sa raison,
Collant sa face morne et lasse
Aux noirs barreaux de sa prison.

Pareil au lion qui soupire
Sous le vil fouet de ses gardiens,
Hélas ! j’ai vu le dieu Shakspere
Aux gages des comédiens;

J’ai vu Cervantes, pauvre esclave,
Au bagne exhalant ses sanglots,
Et Camoëns sanglant et hâve
Luttant dans l’écume des flots;

J’ai vu, tant le destin se joue
En des caprices insensés,
Corneille marchant dans la boue
Avec ses souliers rapiécés,

Et Racine, cet idolâtre,
Tombant les regards éblouis
Par le tonnerre de théâtre
Que lançaient les yeux de LOUIS,

Et Chénier, dont le trait rapide
Atteignait sa victime au flanc,
Versant sur l’échafaud stupide
La belle pourpre de son sang.

Brillant de la splendeur première,
Tous ces grands exilés des cieux,
Tous ces hommes porte-lumière
Avaient des astres dans leurs yeux.

Lorsqu’elle frappait notre oreille
Avec le bruit du flot amer,
Leur voix immense était pareille
À la tumultueuse mer,

Et leur rire plein d’étincelles
Semblait lancer dans l’aquilon
Des flèches pareilles à celles
De l’archer Phœbus Apollon.

Pourtant sans foyer et sans joie,
Sous les cieux incléments et froids
Ils traînaient leur misère, proie
De la foule, ou jouet des rois.

Et dans ses colères, la Vie,
Brisant ce qui leur était cher,
D’une dent folle, inassouvie,
Mordait cruellement leur chair.

Les mettant dans la troupe vile
Des mendiants que nous raillons,
Elle les poussait dans la ville
Affublés de sombres haillons;

Sur eux acharnée en sa rage,
Et voulant les réduire enfin,
Elle leur prodiguait l’outrage,
La pauvreté, l’exil, la faim,

Et les pourchassait, misérables
Qui n’espèrent plus de rachats,
Ayant tous leurs fronts vénérables
Souillés de ses impurs crachats!

Mais enfin la compagne sûre
Venait; la radieuse Mort
Lavait tendrement la blessure
De leurs seins exempts de remord.

Ainsi que les mères farouches
Qui sont prodigues du baiser,
Elle les baisait sur leurs bouches
Doucement, pour les apaiser.

Sous leurs pas, ainsi qu’une Omphale,
Elle étendait au grand soleil
La rouge pourpre triomphale
Pour leur faire un tapis vermeil,

Et sur leurs fronts brillants de gloire
Devant le peuple meurtrier,
Avec ses belles mains d’ivoire
Elle attachait le noir laurier.

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Message par Sarty Mer 26 Aoû 2020 - 23:32

« Eh ! quoi ! vous ici, mon cher ? Vous, dans un mauvais lieu ! vous, le buveur de quintessences ! vous, le mangeur d’ambroisie ! En vérité, il y a là de quoi me surprendre.
— Mon cher, vous connaissez ma terreur des chevaux et des voitures. Tout à l’heure, comme je traversais le boulevard, en grande hâte, et que je sautillais dans la boue, à travers ce chaos mouvant où la mort arrive au galop de tous les côtés à la fois, mon auréole, dans un mouvement brusque, a glissé de ma tête dans la fange du macadam. Je n’ai pas eu le courage de la ramasser. J’ai jugé moins désagréable de perdre mes insignes que de me faire rompre les os. Et puis, me suis-je dit, à quelque chose malheur est bon. Je puis maintenant me promener incognito, faire des actions basses, et me livrer à la crapule, comme les simples mortels. Et me voici, tout semblable à vous, comme vous voyez !
— Vous devriez au moins faire afficher cette auréole, ou la faire réclamer par le commissaire.
— Ma foi ! non. Je me trouve bien ici. Vous seul, vous m’avez reconnu. D’ailleurs la dignité m’ennuie. Ensuite je pense avec joie que quelque mauvais poëte la ramassera et s’en coiffera impudemment. Faire un heureux, quelle jouissance ! et surtout un heureux qui me fera rire ! Pensez à X, ou à Z ! Hein ! comme ce sera drôle ! »

Perte d'auréole

Malheureux peut-être l’homme, mais heureux l’artiste que le désir déchire !
Je brûle de peindre celle qui m’est apparue si rarement et qui a fui si vite, comme une belle chose regrettable derrière le voyageur emporté dans la nuit. Comme il y a longtemps déjà qu’elle a disparu !
Elle est belle, et plus que belle ; elle est surprenante. En elle le noir abonde : et tout ce qu’elle inspire est nocturne et profond. Ses yeux sont deux antres où scintille vaguement le mystère, et son regard illumine comme l’éclair : c’est une explosion dans les ténèbres.
Je la comparerais à un soleil noir, si l’on pouvait concevoir un astre noir versant la lumière et le bonheur. Mais elle fait plus volontiers penser à la lune, qui sans doute l’a marquée de sa redoutable influence ; non pas la lune blanche des idylles, qui ressemble à une froide mariée, mais la lune sinistre et enivrante, suspendue au fond d’une nuit orageuse et bousculée par les nuées qui courent ; non pas la lune paisible et discrète visitant le sommeil des hommes purs, mais la lune arrachée du ciel, vaincue et révoltée, que les Sorcières thessaliennes contraignent durement à danser sur l’herbe terrifiée !
Dans son petit front habitent la volonté tenace et l’amour de la proie. Cependant, au bas de ce visage inquiétant, où des narines mobiles aspirent l’inconnu et l’impossible, éclate, avec une grâce inexprimable, le rire d’une grande bouche, rouge et blanche, et délicieuse, qui fait rêver au miracle d’une superbe fleur éclose dans un terrain volcanique.
Il y a des femmes qui inspirent l’envie de les vaincre et de jouir d’elles ; mais celle-ci donne le désir de mourir lentement sous son regard.

Le désir de peindre

(Baudelaire, Spleen de Paris)
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Message par Invité Mer 7 Oct 2020 - 1:43

cette nuit j'ai vu
mais non.

personne n'a la couleur
du désir le plus profond.

- Alejandra Pizarnik


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Message par Invité Jeu 15 Oct 2020 - 0:48

Rimbaud a écrit:Ces poètes seront! Quand sera brisé l'infini servage de la femme, quand elle vivra pour elle et par elle, l'homme, - jusqu'ici abominable, - lui ayant donné son renvoi, elle sera poète, elle aussi! La femme trouvera de l'inconnu! Ses mondes d'idées différeront-ils des nôtres? Elle trouvera des choses étranges, insondables, repoussantes, délicieuses; nous les prendrons, nous les comprendrons.  

Et dans ces temps-là, quelqu'une écrivait déjà dans sa chambre :

I’m nobody! Who are you?
Are you nobody, too?
Then there ‘s a pair of us — don’t tell!
They ‘d banish us, you know.
How dreary to be somebody!
How public, like a frog
To tell your name the livelong day
To an admiring bog!

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Message par paຮލຮage Dim 8 Nov 2020 - 23:47

Renée Vivien

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La marée, en dormant, prolonge un souffle égal,
L’âme des conques flotte et bruit sur les rives
Tout m’est hostile, et ma jeunesse me fait mal.
Je suis lasse d’aimer les formes fugitives.
Debout, je prends mon cœur où l’amour fut hier
Si puissant, et voici : je le jette à la mer.

Qu’une vague légère et dansante l’emporte,
Que la mer l’associe à son profond travail
Et l’entraîne à son gré, comme une chose morte,
Qu’un remous le suspende aux branches de corail,
Que le vouloir des vents contraires le soulève
Et qu’il roule, parmi les galets, sur la grève.

Qu’il hésite et qu’il flotte, un soir, emprisonné
Par la longue chevelure des algues blondes,
Que le songe de l’eau calme lui soit donné
Dans le fallacieux crépuscule des ondes
Et que mon cœur, soumis enfin, tranquille et doux,
Obéisse au vouloir du vent et des remous.

L’heure est vaste, les morts charmantes sont en elles,
Et je donne mon cœur à la mer éternelle.

.

.

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Poème  :
paຮލຮage
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Message par Invité Dim 21 Fév 2021 - 17:38

Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,
Ô Beauté ? ton regard infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.

Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore;
Tu répands des parfums comme un soir orageux;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.

Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.

Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.

L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,
Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.

Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
Ô Beauté, monstre énorme, effrayant, ingénu!
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?

De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! -
L'univers moins hideux et les instants moins lourds.



Charles Baudelaire - Hymne à la beauté

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Message par Archiloque Dim 21 Fév 2021 - 17:49

Anna Akhmatova a écrit:
Insomnie

Quelque part des chats funèbres miaulent,
Je guette le bruit lointain de pas…
Comme elles bercent bien tes paroles :
Depuis trois mois je n'en dors pas.

Insomnie, de nouveau te voilà !
Ta face figée, je la connais.
Toi, ma belle, toi, sans foi ni loi,
Dis-moi, est-ce que ma chanson te plaît ?

Les fenêtres de blanc s'auréolent,
La pénombre bleuit au matin…
Quelle nouvelle de loin nous console ?
Pourquoi suis-je avec toi si bien ?
Archiloque
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Message par Invité Mar 6 Avr 2021 - 12:58

Je lis très peu de poésie. Je lis seulement les fleurs du mal, très lentement. Je n'ai lu que environ 30 pages sur environ 200 alors que j'ai le livre depuis pas mal de temps.

Mais j'aime bien. Quand ça parle de la nature. Et celui là j'adore, surtout à partir de envole toi.

Charles BAUDELAIRE
1821 - 1867

Élévation

Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées,
Des montagnes, des bois, des nuages, des mers,
Par delà le soleil, par delà les ésthers,
Par delà les confins des sphères étoilées,

Mon esprit, tu te meus avec agilité,
Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde,
Tu sillonnes gayement l'immensité profonde
Avec une indicible et mâle volupté.

Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ;
Va te purifier dans l'air supérieur,
Et bois, comme une pure et divine liqueur,
Le feu clair qui remplit les espaces limpides.

Derrière les ennuis et les vastes chagrins
Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse,
Heureux celui qui peut d'une aile vigoureuse
S'élancer vers les champs lumineux et sereins ;

Celui dont les pensers, comme des alouettes,
Vers les cieux le matin prennent un libre essor,
- Qui plane sur la vie, et comprend sans effort
Le langage des fleurs et des choses muettes !

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Message par pili Mar 6 Avr 2021 - 17:39

Jean Venturini. Mort pour la France à 19 ans dans un sous-marin en 1940, au large de l'Afrique.

Sang

Dans mes veines ce n’est pas du sang qui
coule, c’est l’eau, l’eau amère des océans
houleux…
Des bonaces, des jours pleins gonflent
ma poitrine, préludes aux blancs vertiges
des ouragans…
Des poulpes étirent la soie crissante de
leurs doigts et leurs yeux illunés clignotent
par mes yeux…
Des galions pourris d’or, des mâts, des
éperons de fer passent en tumulte dans
des marées énormes…
Tous les anneaux mystiques jetés aux
lagunes adriatiques, je les ai pour les donner
à celle que j’aime…
J’ai des ressacs mugissants dans mes mains
aux heures d’amour…
Et trop souvent j’étreins d’irréelles écumes
blanches qui fuient sous mon désir de chair…

© Jean Venturini ( Outlines )
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Message par Confiteor Mar 6 Avr 2021 - 17:47

Bien entendu dans mon cas :

Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le cœur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers.
/…/
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir, cœurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s’écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons !
/…/
Amer savoir, celui qu’on tire du voyage !
Le monde, monotone et petit, aujourd’hui,
Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image :
Une oasis d’horreur dans un désert d’ennui !


Charles Baudelaire in « Les fleurs du mal » 1858
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Message par Invité Mar 6 Avr 2021 - 18:09

Vers de terre
Dans mon verre
Levé aux cieux
Nom de Dieu

Ambroise Pilon (1860-1911)

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Message par david50 Mar 6 Avr 2021 - 19:25

Las de l'amer repos où ma paresse offense
Une gloire pour qui jadis j'ai fui l'enfance
Adorable des bois de roses sous l'azur
Naturel, et plus las sept fois du pacte dur
De creuser par veillée une fosse nouvelle
Dans le terrain avare et froid de ma cervelle,
Fossoyeur sans pitié pour la stérilité,
— Que dire à cette Aurore, ô Rêves, visité
Par les roses, quand, peur de ses roses livides,
Le vaste cimetière unira les trous vides ? —
Je veux délaisser l'Art vorace d'un pays
Cruel, et, souriant aux reproches vieillis
Que me font mes amis, le passé, le génie,
Et ma lampe qui sait pourtant mon agonie,
Imiter le Chinois au cœur limpide et fin
De qui l'extase pure est de peindre la fin
Sur ses tasses de neige à la lune ravie
D'une bizarre fleur qui parfume sa vie
Transparente, la fleur qu'il a sentie, enfant,
Au filigrane bleu de l'âme se greffant.
Et, la mort telle avec le seul rêve du sage,
Serein, je vais choisir un jeune paysage
Que je peindrais encor sur les tasses, distrait.
Une ligne d'azur mince et pâle serait
Un lac, parmi le ciel de porcelaine nue,
Un clair croissant perdu par une blanche nue
Trempe sa corne calme en la glace des eaux,
Non loin de trois grands cils d'émeraude, roseaux.

Stéphane Mallarmé.
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Message par Invité Mar 6 Avr 2021 - 21:30

Je muselle Pilon en faveur de Ruckert avec son tragique ici ben der Welt abhanden gekommen qui traduit donne ceci :

Je me suis retiré du monde
Où je n’avais que trop perdu mon temps
On ne sait plus rien de moi depuis si longtemps
Qu’on doit assurément me croire mort !
Et peu m’importe à dire vrai
Qu’on me tienne pour mort
Je n’a rien à y redire
Car je suis vraiment mort au monde
Je suis mort au tumulte du monde
Et me repose dans une contrée silencieuse
Je vis seul dans mon ciel
Dans mon amour, dans mon chant ...

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Message par Invité Mar 6 Avr 2021 - 22:02

Peter Sinfield, "Epitaph" (1969)

The wall on which the prophets wrote
Is cracking at the seams.
Upon the instruments if death
The sunlight brightly gleams.
When every man is torn apart
With nightmares and with dreams,
Will no one lay the laurel wreath
As silence drowns the screams.
Between the iron gates of fate,
The seeds of time were sown,
And watered by the deeds of those
Who know and who are known;
Knowledge is a deadly friend
When no one sets the rules.
The fate of all mankind I see
Is in the hands of fools.
Confusion will be my epitaph.
As I crawl a cracked and broken path
If we make it we can all sit back
And laugh.
But I fear tomorrow I'll be crying,
Yes I fear tomorrow I'll be crying.

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Message par david50 Mar 6 Avr 2021 - 22:17

Je suis un évadé.
Du jour de ma naissance
En moi-même reclus,
Je me suis fait transfuge.

Puisqu’il faut qu’on se lasse
D’être en un même lieu,
Pourquoi ne se lasser
D’être à soi toujours égal ?

De moi mon âme est en quête
Mais je bats la campagne,
Fasse le ciel qu’elle
Ne me trouve jamais.

N’être qu’un est une geôle ;
Être moi, c’est n’être point.
Dans la fuite je vivrai –
Pourtant bel et bien je vis.

F. Pessoa
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Message par espérance Lun 26 Avr 2021 - 11:45

O UBI CAMPI !

Ma campagne, ô cité, ne connaît pas tes fièvres,
Doux est son lait, amer ton vin dispendieux ;
Et tu n'as pas non plus son coeur mélodieux,
Et des chants maternels, nourrice tu me sèvres !

Oh ! rafraîchir aux purs baisers d'antan mes lèvres !
Dans la paix balsamique où vivaient mes aïeux,
Remonter les sentiers qui montent vers les cieux,
Pâtre enfant d'un troupeau cabriolant de chèvres !

A ma place au foyer familial m'asseoir,
Ouïr dans le pieux recueillement du soir
L'aïeule ouvrant son âme ainsi qu'un reliquaire !

Aux murmures des champs, des bois, oh! sans rancoeur,
Redevenu tout simple et pur comme naguère,
Endormir ma raison, laisser chanter mon coeur !

Gabriel Monmert.


Je trouve que ce poème est d'une grande beauté. Je voudrais attirer votre attention sur ces vers :

"A ma place au foyer familial m'asseoir
 Ouïr dans le pieux recueillement du soir
 L'aïeule ouvrant son âme ainsi qu'un reliquaire !"

Je ne sais pas ce que vous en pensez, et des retours à ce sujet m'intéresseraient beaucoup. Je suis particulièrement sensible à la poésie. De grands poètes ont superbement écrit, sur la nature, les sentiments, etc. Celui-ci n'a qu'une petite notoriété régionale. Là, étant donné la complexité de la vie cela m'est complètement indifférent. Mais je dois dire que ces vers me bouleversent comme je ne l'ai jamais été par aucune  autre poésie.

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Message par So Sûre 2 Mar 25 Mai 2021 - 16:32

http://poemes-sur-toile.over-blog.com/article-32686935.html#:~:text=Pour%20que%20son%20tourment%20soit%20au%20plus%20vite%20apais%C3%A9.&text=Comme%20jamais%20cela%20ne%20serait%20arriver%2C%20toujours%20et%20encore.&text=Pour%20l'emp%C3%AAcher%20de%20partir%20si%20je%20devenais%20un%20jour%20ind%C3%A9cent.

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Dernière édition par So Sûre 2 le Mar 25 Mai 2021 - 16:35, édité 1 fois (Raison : *ajout)
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Message par S'effacer Mar 1 Juin 2021 - 13:59




Les sanglots longs
Des violons
De l’automne

Blessent mon cœur
D’une langueur
Monotone.

Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l’heure,

Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure

Et je m’en vais
Au vent mauvais
Qui m’emporte

Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.

S'effacer

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Message par Sarty Mar 8 Juin 2021 - 20:00

Le Retour

Regarde, ils reviennent, vois leurs mouvements
Hésitants, et leurs pieds très lents,
Leur pas troublé, prêt
À chanceler !
Regarde, ils reviennent, l'un après l'autre,
Ils ont peur, ils dorment à moitié ;
Comme si la neige devait hésiter à tomber,
Murmurer dans le vent,
                et s'en retourner ;
Ils étaient la Terreur,
                 L'Interdit.

Les Dieux aux chaussures ailées !
Accompagnés de leurs meutes argentées,
                                 flairant l'air !

Oh! Oh!
          Prêts à tout ravager!
Et quel odorat fin !
Ô âmes de sang !

Lâchez la laisse,
                       hommes blêmes !

Ezra Pound, Ripostes, 1912


Tenzone

Allez-vous les accepter ?
       (c'est-à dire ces chansons).
Comme une fille craintive le centaure
       (ou le centurion),
Déjà elles vous fuient, hurlant de peur.

Serez-vous touchés par les vraisemblances ?
      Nul ne peut tenter leur vierge stupidité.
Je vous en prie, critiques amicaux,
N'essayez pas de m'offrir un public.

Indompté, je vis avec mes semblables
       sur les hauteurs escarpées ;
       leurs recoins secrets
Reconnaissent l'écho de mes talons,
       dans la froide lumière,
       dans l'obscurité.

Lustra, 1913

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Message par Invité Mar 8 Juin 2021 - 20:11

Pound convoque et reçoit
Le manquant de ces lieux
Ici même sur ces lignes
Ignifugées de cet espace
Unique où chacun passe
Repasse disparaît puis soudain
N’est plus. Mais Ézra veille
Comme le chat ailé
Cher en notre fille
Qui légitime questionne
Ici même des doutes  
Clefs que d’autres ignorent.
Mais que se taisent
Ces mots opportuns
Qui ici ne peuvent
Avoir place car leur
Petitesse est trop faste.
Merci de ce retour.

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Message par *SoSûre* Lun 14 Juin 2021 - 10:08

Ils cassent le monde.
Fred CM1 B/YouT
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Message par *SoSûre* Jeu 17 Juin 2021 - 14:57

Vos poèmes préférés - Page 8 Img_2078

Vos poèmes préférés - Page 8 Img_2079

Vos poèmes préférés - Page 8 Img_2080

Lire les livrets, des livrets, et des pochettes de cds,

Livret cd
Je suis plusieurs.
Swaat. 

----

Bon après, On sait pas, si c'est son whiskey ou son waisse qui lui a dit.. Les sons sons l'à part au doute...  Approuve
*SoSûre*
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Message par isadora Mer 23 Juin 2021 - 11:16

Nous habitons le monde comme de simples tournesols plantés là, réclamant notre part d'eau et d'azur. Notre part de rêve aussi, comme la réclame le rocher ou le vent. Ce n'est pas parce que personne ne les devine que les rêves et les secrets, au fond des choses, n'ont pas lieu d'être. Foule de tournesols, réunis en tribu ils forment comme une mer, un cri qu'ils remplissent de jaune jusqu'aux oreilles ; car le jaune est davantage un clairon qu'une couleur. Sourire, d'un jaune qui reste sur les lèvres du promeneur. Sourire. Une autre fois, il, ce tournesol, sortira du paysage et restera solitaire sur une toile ; et si, d'un tourment, il a été peint de la main d'un Van Gohg, c'est bien une forme d'éternité qui lui sera offerte. L'éternité tout simplement ... Une autre fois, un dimanche, il se fera motif humblement imprimé sur une ordinaire toile cirée. Le temps d'un repas, il sera recouvert de miettes de pain et de paroles, une offrande. Et parfois au beau milieu des miettes et des paroles, des éclats solaires viendront s'agenouiller. Nous habitons le monde à l'égal des tournesols. Il arrive qu'ils brillent ou dansent ou s'étiolent et meurent, ou bien s'éternisent planté sur un mur de musée. Nous aussi, quand un épris de nous, garde précieusement en lui et pour toujours, intime musée sentimental, le jaune vif, un temps, de notre présence au monde.


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Message par Sarty Dim 11 Juil 2021 - 13:47

O ce tardif novembre, et une sauterelle, o arrois stellaires etc. Et la lune et le rouge et la neige etc Tonnerre, feu, glace, chars de triomphe  

C'était une façon de dire les choses - mais pas très satisfaisante :
Une étude périphrastique sur un mode poétique désuet,
Vous laissant toujours en proie à l'intolérable lutte
Avec les mots et les sens. La poésie n'importe pas.
Ce n'était pas (pour repartir) ce que l'on avait escompté.
Quelle allait être la valeur du calme longtemps attendu,
Longuement espéré, la sérénité automnale
Et la sagesse de l'âge ? Nous avait-ils leurrés
Ou s'étaient-ils leurrés eux-mêmes, les aînés à la voix tranquille ?
Nous avaient-ils légué simplement une recette de duperie ?
La sérénité n'était-elle qu'hébétude délibérée,
La sagesse que la connaissance de secrets morts
Inutiles dans la ténèbre où ils plongeaient
Ou dont ils détournaient les yeux ?
Le savoir impose un motif, et par là fausse
Car le motif se renouvelle à chaque moment
Chaque moment est une neuve et bouleversante
Évaluation de tout ce que nous fûmes. Nous sommes seulement détrompés
De tout ce qui, en nous trompant, ne pourrait plus nous nuire.
Étant à mi-chemin, pas seulement à mi-chemin,
Tout le long du chemin, dans un bois noir, dans la ronçaie,
Sur le bord d'un bourbier où le pied ne peut s'assurer,
Risquant l'ensorcellement. Que je n'entende pas parler
De la sagesse des anciens, mais bien plutôt de leur folie.

ts eliot

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Message par Prince Joann visite Mar 27 Juil 2021 - 16:05

Assez vu. La vision s’est rencontrée à tous les airs.
Assez eu. Rumeurs des villes, le soir, et au soleil, et toujours.
Assez connu. Les arrêts de la vie. – Ô Rumeurs et Visions !
Départ dans l’affection et le bruit neufs !



- Arthur Rimbaud, Illuminations
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Message par Prince Joann visite Mer 25 Aoû 2021 - 2:05

"La vie n’est pas bruit ni orage,
Elle est ainsi: il neige,
La maison est éclairée,
Quelqu’un s’approche.
Lentement, la sonnerie étincelle,
Il entre. Lève les yeux.
Pas un bruit.
Les icônes flambent."


- Marina Tsvétaïéva
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Message par Kafka Ven 27 Aoû 2021 - 2:32

Difficile, dans les mentions honorables je dirais Voyage à Cythère de Baudelaire, Barbara de Prévert, L'Isolement de Lamartine, par exemple, ce qui n'est pas spécialement original. Je suis assez hermétique à la poésie étrangère malheureusement, la traduction me gêne beaucoup plus en poésie que dans le roman ou l'essai. Mais pour les poèmes étrangers, je mettrais quand même dans mon top Ozymandias, de Shelley. Je pense que c'est une bonne image pour illustrer l'inutilité de l'orgueil

I met a traveller from an antique land
Who said: "Two vast and trunkless legs of stone
Stand in the desert. Near them, on the sand,
Half sunk, a shattered visage lies, whose frown,

And wrinkled lip, and sneer of cold command,
Tell that its sculptor well those passions read,
Which yet survive, stamped on these lifeless things,
The hand that mocked them and the heart that fed,

And on the pedestal these words appear:
'My name is Ozymandias, king of kings:
Look on my works, Ye Mighty, and despair!'

Nothing beside remains. Round the decay
Of that colossal wreck, boundless and bare,
The lone and level sands stretch far away.


Pour les poèmes français, je pense que ma préférence finale va à ce poème de Vigny.

Efface ce séjour, ô Dieu ! de ma paupière,
Ou rends-le-moi semblable à celui d'autrefois,
Quand la maison vibrait comme un grand coeur de pierre
De tous ces coeurs joyeux qui battaient sous ses toits !

A l'heure où la rosée au soleil s'évapore,
Tous ces volets fermés s'ouvraient à sa chaleur,
Pour y laisser entrer, avec la tiède aurore,
Les nocturnes parfums de nos vignes en fleur.

On eût dit que ces murs respiraient comme un être
Des pampres réjouis la jeune exhalaison ;
La vie apparaissait rose, à chaque fenêtre,
Sous les beaux traits d'enfants nichés dans la maison.

Leurs blonds cheveux épars au vent de la montagne,
Les filles, se passant leurs deux mains sur les yeux,
Jetaient des cris de joie à l'écho des montagnes,
Ou sur leurs seins naissants croisaient leurs doigts pieux.

La mère, de sa couche à ces doux bruits levée,
Sur ces fronts inégaux se penchait tour à tour,
Comme la poule heureuse assemble sa couvée,
Leur apprenant les mots qui bénissent le jour.

Moins de balbutiements sortent du nid sonore,
Quand, au rayon d'été qui vient la réveiller,
L'hirondelle, au plafond qui les abrite encore,
A ses petits sans plume apprend à gazouiller.

Et les bruits du foyer que l'aube fait renaître,
Les pas des serviteurs sur les degrés de bois,
Les aboiements du chien qui voit sortir son maître,
Le mendiant plaintif qui fait pleurer sa voix.

Montaient avec le jour ; et, dans les intervalles,
Sous des doigts de quinze ans répétant leur leçon,
Les claviers résonnaient ainsi que des cigales
Qui font tinter l'oreille au temps de la moisson !

Puis ces bruits d'année en année
Baissèrent d'une vie, hélas ! et d'une voix ;
Une fenêtre en deuil, à l'ombre condamnée,
Se ferma sous le bord des toits.

Printemps après printemps, de belles fiancées
Suivirent de chers ravisseurs,
Et, par la mère en pleurs sur le seuil embrassées,
Partirent en baisant leurs soeurs.

Puis sortit un matin pour le champ où l'on pleure
Le cercueil tardif de I'aïeul,
Puis un autre, et puis deux ; et puis dans la demeure
Un vieillard morne resta seul !

Puis la maison glissa sur la pente rapide
Où le temps entasse les jours ;
Puis la porte à jamais se ferma sur le vide,
Et l'ortie envahit les cours ! ...


(La Vigne et la Maison)

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Message par Prince Joann visite Jeu 14 Oct 2021 - 3:29

Je suis haï. Pourquoi ? Parce que je défends
Les faibles, les vaincus, les petits, les enfants.
Je suis calomnié. Pourquoi ? Parce que j’aime
Les bouches sans venin, les cœurs sans stratagème.

Le bonze aux yeux baissés m’abhorre avec ferveur,
Mais qu’est-ce que cela me fait, à moi rêveur ?
Je sens au fond des cieux quelqu’un qui voit mon âme ;
Cela suffit. Le flot ne brise point la rame,
Le vent ne brise pas l’aile, l’adversité
Ne brise pas l’esprit qui va vers la clarté.

Je vois en moi l’erreur tomber et le jour croître ;
Je sens grandir le temple et s’écrouler le cloître.
Rien de fermé. Le ciel ouvert. L’étoile à nu.
L’idole disparaît, Dieu vient. C’est l’inconnu,

Mais le certain. Je sens dans mon âme ravie
La dilatation superbe de la vie,
Et la sécurité du fond vrai sous mes pas.
L’abri pour le sommeil, le pain pour le repas,
Je les trouve. D’ailleurs les heures passent vite.
Quelquefois on me suit, quelquefois on m’évite ;

Je vais. Souvent mes pieds sont las, mon cœur jamais.
Le juste, — Hélas, je saigne, où sont ceux que j’aimais ? –
Sent qu’il va droit au but quand au hasard il marche.
Je suis, comme jadis l’antique patriarche,
Penché sur une énigme où j’aperçois du jour.

Je crie à l’ombre immense : Amour ! Amour ! Amour !
Je dis : espère et crois, qui que tu sois qui souffres !
Je sens trembler sous moi l’arche du pont des gouffres ;
Pourtant je passerai, j’en suis sûr. Avançons.

Par moments la forêt penche tous ses frissons
Sur ma tête, et la nuit m’attend dans les bois traîtres ;
Je suis proscrit des rois, je suis maudit des prêtres ;
Je ne sais pas un mois d’avance où je serai
Le mois suivant, l’orage étant démesuré ;

Puis l’azur reparaît, l’azur que rien n’altère ;
Ma route, blanche au ciel, est noire sur la terre ;
Je subis tour à tour tous les vents de l’exil ;
J’ai contre moi quiconque est fort, quiconque est vil ;

Ceux d’en bas, ceux d’en haut pour m’abattre s’unissent ;
Mais qu’importe ! Parfois des berceaux me bénissent,
L’homme en pleurs me sourit, le firmament est bleu,
Et faire son devoir est un droit. Gloire à Dieu !


- Victor Hugo
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Message par Prince Joann visite Dim 5 Déc 2021 - 17:47

espérance a écrit:O UBI CAMPI !

Ma campagne, ô cité, ne connaît pas tes fièvres,
Doux est son lait, amer ton vin dispendieux ;
Et tu n'as pas non plus son coeur mélodieux,
Et des chants maternels, nourrice tu me sèvres !

Oh ! rafraîchir aux purs baisers d'antan mes lèvres !
Dans la paix balsamique où vivaient mes aïeux,
Remonter les sentiers qui montent vers les cieux,
Pâtre enfant d'un troupeau cabriolant de chèvres !

A ma place au foyer familial m'asseoir,
Ouïr dans le pieux recueillement du soir
L'aïeule ouvrant son âme ainsi qu'un reliquaire !

Aux murmures des champs, des bois, oh! sans rancoeur,
Redevenu tout simple et pur comme naguère,
Endormir ma raison, laisser chanter mon coeur !

Gabriel Monmert.


Je trouve que ce poème est d'une grande beauté. Je voudrais attirer votre attention sur ces vers :

"A ma place au foyer familial m'asseoir
 Ouïr dans le pieux recueillement du soir
 L'aïeule ouvrant son âme ainsi qu'un reliquaire !"

Je ne sais pas ce que vous en pensez, et des retours à ce sujet m'intéresseraient beaucoup. Je suis particulièrement sensible à la poésie. De grands poètes ont superbement écrit, sur la nature, les sentiments, etc. Celui-ci n'a qu'une petite notoriété régionale. Là, étant donné la complexité de la vie cela m'est complètement indifférent. Mais je dois dire que ces vers me bouleversent comme je ne l'ai jamais été par aucune  autre poésie.

J'ai ma préférence pour :

"Aux murmures des champs, des bois, oh! sans rancœur,
Redevenu tout simple et pur comme naguère,
Endormir ma raison, laisser chanter mon cœur !"



Je trouve que la poésie à quelque chose de profondément spirituel, être touché par elle c'est comme se rencontrer, s'ouvrir, laisser passer quelque chose qui nous parle, nous écoute, nous répond, nous inquiète même parfois.
J'ai lu un jour quelque chose comme : chaque poésie est destinée à quelqu'un (ou du moins quand on l'a lit, elle devient unique à nos yeux), toujours il y aurait quelque part, une poésie qui nous attend.
À croire que tu as fait une rencontre Smile
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Message par Thaïti Bob Lun 6 Déc 2021 - 18:21

Beams

Elle voulut aller sur les bords de la mer,
Et comme un vent bénin soufflait une embellie,
Nous nous prêtâmes tous à sa belle folie,
Et nous voilà marchant par le chemin amer.

Le soleil luisait haut dans le ciel calme et lisse,
Et dans ses cheveux blonds c'étaient des rayons d'or,
Si bien que nous suivions son pas plus calme encor
Que le déroulement des vagues, ô délice !

Des oiseaux blancs volaient alentour mollement
Et des voiles au loin s'inclinaient toutes blanches.
Parfois de grands varechs filaient en longues branches,
Nos pieds glissaient d'un pur et large mouvement.

Elle se retourna, doucement inquiète
De ne nous croire pas pleinement rassurés,
Mais nous voyant joyeux d'être ses préférés,
Elle reprit sa route et portait haut la tête.

Paul VERLAINE 1844 - 1896
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Message par Thaïti Bob Lun 6 Déc 2021 - 18:32

Un jour déjà trop lointain une fille m'a écrit cet acrostiche sur une carte postale en bois. Je crois que c'est le cadeau qui m'a le plus bouleversé de toute ma vie.

une fille a écrit:Randonneur aguerri tu cheminais à l'
Orée de la plaine de mes sentiments, sous la
Moussue banalité, tu as levé un voile.
Arpenteur de montagnes solitaires, à l'
Imprévisible mont Amour tu es parvenu.
Noués en bouquet, vois mes mots de désir tendus.
Thaïti Bob
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Message par Invité Mar 8 Fév 2022 - 20:23

Charles BAUDELAIRE
1821 - 1867
Incompatibilité


Tout là-haut, tout là-haut, loin de la route sûre,
Des fermes, des vallons, par delà les coteaux,
Par delà les forêts, les tapis de verdure,
Loin des derniers gazons foulés par les troupeaux,

On rencontre un lac sombre encaissé dans l'abîme
Que forment quelques pics désolés et neigeux ;
L'eau, nuit et jour, y dort dans un repos sublime,
Et n'interrompt jamais son silence orageux.

Dans ce morne désert, à l'oreille incertaine
Arrivent par moments des bruits faibles et longs,
Et des échos plus morts que la cloche lointaine
D'une vache qui paît aux penchants des vallons.

Sur ces monts où le vent efface tout vestige,
Ces glaciers pailletés qu'allume le soleil,
Sur ces rochers altiers où guette le vertige,
Dans ce lac où le soir mire son teint vermeil,

Sous mes pieds, sur ma tête et partout, le silence,
Le silence qui fait qu'on voudrait se sauver,
Le silence éternel et la montagne immense,
Car l'air est immobile et tout semble rêver.

On dirait que le ciel, en cette solitude,
Se contemple dans l'onde, et que ces monts, là-bas,
Écoutent, recueillis, dans leur grave attitude,
Un mystère divin que l'homme n'entend pas.

Et lorsque par hasard une nuée errante
Assombrit dans son vol le lac silencieux,
On croirait voir la robe ou l'ombre transparente
D'un esprit qui voyage et passe dans les cieux.


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Message par Normal Jeu 7 Déc 2023 - 21:23

Si je pleure parfois sans causes,
Mes amis, ne me plaignez pas;
J'ai trop aimé l'âme des choses
Et les mystères d'ici-bas.

J'ai trop connu dès mon enfance,
Dans sa grave immobilité,
Le peuple qui garde en silence
Le rêve obscur de la beauté.

Tous ces êtres dans leur mystère
Ont englobé mon cœur d'enfant,
Comme au soir le mont solitaire
Vous prend dans l'ombre qui descend.

J'ai senti l'âme universelle
Des mers, des torrents et des bois
Unir dans sa plainte éternelle
La douleur d'innombrables voix,

C'est pour avoir aimé ces choses
Que je suis tout seul ici-bas.
Si je pleure parfois sans causes,
Mes amis, ne me plaignez pas.

Jeanne Alleman
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Message par câlin Jeu 25 Jan 2024 - 21:53

Guillaume Apolinaire a écrit:
C’est une chose étrange à la fin que le monde
Un jour je m’en irai sans en avoir tout dit
Ces moments de bonheur ces midi d’incendie
La nuit immense et noire aux déchirures blondes.

Rien n’est si précieux peut-être qu’on le croit
D’autres viennent. Ils ont le cœur que j’ai moi-même
Ils savent toucher l’herbe et dire je vous aime
Et rêver dans le soir où s’éteignent des voix.

D’autres qui referont comme moi le voyage
D’autres qui souriront d’un enfant rencontré
Qui se retourneront pour leur nom murmuré
D’autres qui lèveront les yeux vers les nuages.

Il y aura toujours un couple frémissant
Pour qui ce matin-là sera l’aube première
Il y aura toujours l’eau le vent la lumière
Rien ne passe après tout si ce n’est le passant.

C’est une chose au fond que je ne puis comprendre
Cette peur de mourir que les gens ont en eux
Comme si ce n’était pas assez merveilleux
Que le ciel un moment nous ait paru si tendre.

Oui je sais cela peut sembler court un moment
Nous sommes ainsi faits que la joie et la peine
Fuient comme un vin menteur de la coupe trop pleine
Et la mer à nos soifs n’est qu’un commencement

Mais pourtant malgré tout malgré les temps farouches
Le sac lourd à l’échine et le cœur dévasté
Cet impossible choix d’être et d’avoir été
Et la douleur qui laisse une ride à la bouche

Malgré la guerre et l’injustice et l’insomnie
Où l’on porte rongeant votre cœur ce renard
L’amertume et Dieu sait si je l’ai pour ma part
Porté comme un enfant volé toute ma vie

Malgré la méchanceté des gens et les rires
Quand on trébuche et les monstrueuses raisons
Qu’on vous oppose pour vous faire une prison
De ce qu’on aime et de ce qu’on croit un martyre

Malgré les jours maudits qui sont des puits sans fond
Malgré ces nuits sans fin à regarder la haine
Malgré les ennemis les compagnons de chaînes
Mon Dieu mon Dieu qui ne savent pas ce qu’ils font

Malgré l’âge et lorsque soudain le cœur vous flanche
L’entourage prêt à tout croire à donner tort
Indiffèrent à cette chose qui vous mord
Simple histoire de prendre sur vous sa revanche

La cruauté générale et les saloperies
Qu’on vous jette on ne sait trop qui faisant école
Malgré ce qu’on a pensé souffert les idées folles
Sans pouvoir soulager d’une injure ou d’un cri

Cet enfer Malgré tout cauchemars et blessures
Les séparations les deuils les camouflets
Et tout ce qu’on voulait pourtant ce qu’on voulait
De toute sa croyance imbécile à l’azur

Malgré tout je vous dis que cette vie fut telle
Qu’à qui voudra m’entendre à qui je parle ici
N’ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci
Je dirai malgré tout que cette vie fut belle.

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Message par Normal Mer 6 Mar 2024 - 0:21

À la plage, dans le drap brûlant de sable
À côté du fracas tombant de la vague
Au loin l'Ironie du sort
Une petite fille de dix ans
Qui vole sur sa planche
La voix étrangère de l’espèce
Qui s'extirpe de sous les ruines
De mon imagination
Les mains en sueur du criminel
Qui tourne les pages
D'un cahier de note
Une colonie de flamands immobile
Une chaise dans le désert

J'aspire le nouvel
Inconcevable
Dialecte de l'air



- Ewa Lipska (60 minutes de solitude)
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Message par câlin Mer 13 Mar 2024 - 23:20

Renée Vivien a écrit:Dans mon âme a fleuri le miracle des roses.
Pour le mettre à l’abri, tenons les portes closes.

Je défends mon bonheur, comme on fait des trésors,
Contre les regards durs et les bruits du dehors.

Les rideaux sont tirés sur l’odorant silence,
Où l’heure au cours égal coule avec nonchalance.

Aucun souffle ne fait trembler le mimosa
Sur lequel, en chantant, un vol d’oiseaux pesa.

Notre chambre paraît un jardin immobile
Où des parfums errants viennent trouver asile.

Mon existence est comme un voyage accompli.
C’est le calme, c’est le refuge, c’est l’oubli.

Pour garder cette paix faite de lueurs roses,
O ma Sérénité ! tenons les portes closes.

La lampe veille sur les livres endormis,
Et le feu danse, et les meubles sont nos amis.

Je ne sais plus l’aspect glacial de la rue
Où chacun passe, avec une hâte recrue.

Je ne sais plus si l’on médit de nous, ni si
L’on parle encor… Les mots ne font plus mal ici.

Tes cheveux sont plus beaux qu’une forêt d’automne,
Et ton art soucieux les tresse et les ordonne.

Oui, les chuchotements ont perdu leur venin,
Et la haine d’autrui n’est plus qu’un mal bénin.

Ta robe verte a des frissons d’herbes sauvages,
Mon amie, et tes yeux sont pleins de paysages.

Qui viendrait nous troubler, nous qui sommes si loin
Des hommes ? Deux enfants oubliés dans un coin ?

Loin des pavés houleux où se fanent les roses,
Où s’éraillent les chants, tenons les portes closes…

câlin

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Message par Normal Jeu 14 Mar 2024 - 14:12

Deux enfants oubliés dans un coin 


Dernière édition par Normal le Mer 20 Mar 2024 - 1:07, édité 1 fois
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