Question sur "L'élégance du hérisson"

Je viens de finir ce bouquin après l'avoir vu mentionné plusieurs fois sur le forum. J'ai bien aimé mais sans plus, même si la fin est assez émouvante et que Renée et Paloma sont attachantes.

Par contre, ce que je ne comprends pas, c'est comment ce bouquin a pu avoir un aussi large succès : j'ai trouvé certains passages franchement difficiles (celui sur la phénoménologie au début est gratiné) et/ou très poussés en matière de réflexion sur le monde et la beauté. Au total c'est beaucoup d'introspection, d'abstraction et du relationnel.

Que les zèbres accrochent au bouquin, je comprends parce qu'il parle d'eux mais je ne comprends pas qu'il ait pu ratisser un public aussi large par ailleurs. Quelqu'un aurait une hypothèse ? J'ai vu un forumiste parler de snobisme sur un fil mais ça me paraît un peu juste pour expliquer l'ampleur du phénomène.

Question plus mineure : "Paloma" et "Colombe" signifient la même chose. Faut-il à votre avis y voir un discours du type binôme clair/obscur ou Z/non Z ?

Je l'ai lu , j'ai beaucoup aimé jusqu'au dernier chapitre, ou là j'aurai préféré que l'auteur ne l'écrive pas. Grosse déception. Pourquoi cette fin sadique ?
J'ai donc évacuer le livre de ma bibliothèque.

Lu et apprécié également, quoique j'ai trouvé également certains passages lourds et la fin ambigüe (quel est le message : le poids de l'inconscient ou la "destinée" ?)

Pour le succès, je vois 5 pistes y aboutissant :
- livre primé à plusieurs reprises (donc mis en avant dans les librairies + articles de presse)
- la critique de la société, dans laquelle beaucoup vont se retrouver ("ah ca fait du bien, d'autres pensent comme moi et en plus ils sont intelligents")
- le côté attachant et profond des personnages
- l'effet boule de neige : "puisque tout le monde l'a lu, je vais le lire"
- le snobisme (qui ne me paraît donc qu'un élément parmi d'autre)

@fleurdesel
Merci pour ta réponse, la conjonction de tout ça me paraît bien expliquer la chose en effet. J'avais oublié que le livre avait été primé.

"Gâcheur" concernant la fin du roman :

Spoiler:

Je l'ai lu à moitié sans accrocher. Je ne trouve pas ce livre particulièrement intelligent ou sortant de l'ordinaire. Je le trouve "binaire" avec juste un peu d'attention pour le Japonais. Je suis une grande lectrice de romans et j'affirme que d'autres livres moins connotés "surdouance" sont plus profonds et plus émouvants (pour moi). C'est probablement parce que tu souhaites lire des histoires de surdoués qu'il te touche sur ce point-là.

Le succès d'un livre est un truc mystérieux. Déjà le choix de l'éditeur est le résultat de caprices et/ou de piston, ensuite c'est une affaire de marketing médiatique avec une part plus hasardeuse de bouche à oreille (notamment par les blogs de lecteurs).

cramique a écrit:C'est probablement parce que tu souhaites lire des histoires de surdoués qu'il te touche sur ce point-là.

Ben non justement, je n'ai pas été transporté par le bouquin. Par contre je trouve qu'il sort de l'ordinaire, dans la mesure où il adopte de manière explicite le point de vue de surdouées, ça ne me paraît pas si fréquent, et je m'étonne que ça ait du succès ; mais probablement le succès est dû à d'autres raisons, comme l'écrit Fleurdesel.

Par contre, j'ai bien aimé les passages sur la beauté vers la fin, qui concordent avec des réflexions que je me fais parfois : une des rares choses vraiment réelles, ou plutôt qui donnent vraiment des sensations fortes, c'est la beauté. A part ça, je trouve le livre plutôt bien écrit mais un peu précieux.

fleurdesel a écrit:Pour le succès, je vois 5 pistes y aboutissant :
- livre primé à plusieurs reprises (donc mis en avant dans les librairies + articles de presse)
- la critique de la société, dans laquelle beaucoup vont se retrouver ("ah ca fait du bien, d'autres pensent comme moi et en plus ils sont intelligents")
- le côté attachant et profond des personnages
- l'effet boule de neige : "puisque tout le monde l'a lu, je vais le lire"
- le snobisme (qui ne me paraît donc qu'un élément parmi d'autre)

Mon humble opinion en édition de ton message.

Matérialiser un fantasme virtuellement ! Sans se tâcher ! Cool !
Pour cette monographie il y a quand même matière à se mettre facilement dans la peaux de nombreux personnages atypiques , non ?
concierge titi parisienne
ado Z bien perchée
voisin jap' charmant de zenitude et d'attentionS
parents bien ultra conditionnés
soeur niaise (de mémoire je suis plus sure)
en une seule lecture voyage au coeur de l'intimité de la vie occidentale névrosée Avec une touche d'orient (merci voisin pour le coup de fraîcheur !)
Forcément on se sent plus léger car on pourrait se dire " ouf sont graves quand même je suis pas comme EUX dans le bouquin quand même ! "
Ou au contraire COmpris pour les Z qui auraient besoin d'un miroir de réveil d'un regard plus rayonnant sur leur personne !!

aller m'en vais voir si les épines de mon voisin sont parfaitement symétriques j'adore les hérissons mais pas autant que les rosiers !

.

Il était bof pour moi, un peu indigeste, une bonne idée de départ. A l'époque je ne savais pas que j'étais Z' quand je l'ai lu. Je l'ai lu uniquement pour apprendre du vocabulaire, parce que ça, utiliser du vocabulaire chiadé, l'auteur s'est fait plaisir.

En général, tout ce qui reçoit un prix, me déçoit. Je ne sais pas sur quels critères ils se basent pour récompenser, dire qu'il y a autant de succès

Ha c'est drôle je l'ai lu il y a longtemps mais n'avait pas fait le rapport.
Par contre l'évidence pour moi...c'était ... comment dire ???
C'est une personne très âgée qui me l'avait offert, avec qui j'avais beaucoup de plaisir à partager tant de choses qui se disent avec des mots, des gestes , les yeux, le cœur...
" Je vous aime " trop pudique n'a jamais été prononcé , mais c'était le cadeau d'anniversaire....qu'elle avait choisi pour moi...
Une femme exceptionnelle qui avait vécu tant de choses dans sa vie du bas au haut de l'échelle...
Partager cette lecture cadeau...ça a été un message très fort, comme si elle me disait que nous nous " reconnaissions"...Je suis très émue de vous raconter ça...
Pour moi, ce succès a peut être une source dans la générosité, le partage et l'écoute. Passer derrière le mur de la première partie du livre pour accéder à l'intime , toute une symbolique ....Passer les barrières des âges, des différences , des a priori...
Le message d'un " crois en toi ", d'un " prends goût à la persévérance ".... enfin, je l'ai " reçu comme ça".

Je n'ai pas lu le livre mais le film m'a beaucoup touchée... il est très bien joué.

J'ai trouvé ce livre insupportable, en particulier à cause du ton prétentieux et suffisant de l'auteur, qui d'ailleurs va de paire avec les idées que le livre contient. J'ai sauté la moitié des pages et je ne l'ai pas terminé.

J'adore ce passage : "Elle (Renée) a l’élégance du hérisson : à l’extérieur, elle est
bardée de piquants, une vraie forteresse, mais j’ai l’intuition qu’à
l’intérieur, elle est aussi simplement raffinée que les hérissons,
qui sont des petites bêtes faussement indolentes, farouchement
solitaires et terriblement élégantes."

Et celui là : "Depuis longtemps, je sais que la destination finale,... c’est le
bocal à poissons : un monde où les adultes se cognent comme
des mouches à la même vitre. Mais ce qui est certain, c’est que
dans le bocal,... j’irai pas !"

Tous les hérissons sont élégants, n'est-ce pas Mily

Hell yeah!
Wait! Show me those shoes again!?

Étonnant, malgré la critique dithyrambique, ce livre ne m'a jamais donné envie.

Mily a écrit:Hell yeah!
Wait! Show me those shoes again!? 

Shhhh, they'll all want to see them.
Ah non, les noirs c'était pour samedi dernier... là c'est des marrons pour samedi prochain. Demain il faut choisir une cravate et une pochette en soie, à repasser.

Vu les critiques, j'ai envie de lire le bouquin maintenant, pour faire mes propres idées... Faut juste que je prenne des vacances pour avoir le temps de le lire !

Et bien comme il ne faut pas mourir idiot, et que c'est en passe de devenir un livre "culte", je propose un truc ...

Un genre de "reader's club". On le lit et après, on échange nos impressions.
Je vais ouvrir un sujet à part si quelqu'un d'autre est intéressé.

Le film est pour moi un concentré d'émotions, d'intelligence du coeur, de raffinements.
J'aimerais qu'un homme comme monsieur Kakuro Ozu me fasse la cour
J'aimerais avoir une concierge comme Renée et rencontrer une petite fille comme Paloma.
J'aimerais toucher le coeur des gens comme le fait ce film.

@ Mlle Milly: pourquoi pas donner directement nos impressions sur ce fil-ci... puisqu'il est déjà là et qu'il porte déjà sur le sujet ?

Moi je l'ai trouvé très amusant ce livre, une amie m'en avait parlé. Je ne savais même pas que la "critique" avait aimé à ce point-là..

Et il est dans la section de ma bibliothèque des romans que j'ai préféré et que je consulte de temps à autres.

J'aime la lucidité critique impitoyable des propos, qui aborde autant des questions métaphysiques que sociopolitique, ou linguistique. Ça me fait penser un peu au cinéma de Rohmer...
Et contrairement à d'autres, je ne trouve pas le ton pompeux, au contraire, il me semble que l'auteur réussit à éviter un ton trop didactique en y mêlant beaucoup d'humour.

Et on garde toujours une distanciation qui permet d'éviter l'impression qu'on encense les gens doués...
Par exemple, au début (p. 33) :Ppeut-on être aussi doué et aussi aveugle à la présence des choses ?

D'ailleurs : juste appelé les chapitres de la jeune fille "pensée profonde No ...", c'est déjà humoristique quant à moi, ça introduit un décalage qui nous fait nous rendre compte qu'on regarde déjà cette profondeur avec suspicion et que ce n'est finalement pas aussi profond.

À moins que cette manière de numéroter les pensées n'évoque aussi plutôt la structure de Spinoza où quant à moi le philosophe dit des "banalités" sous couvert de grande rigueur. (J'en connais des spinozistes sur le forum qui me lyncheront s'ils me lisent.. Mais après tout ce jugement est tellement subjectif qu'on peut dire la même chose des philosophes d'aujourd'hui ou de quiconque parle. )..
Bref ce genre de clin d'oeil créant une tension dans la signification qu'on peut lui porter, je trouve ça très amusant.

Ce qui me fait penser que le décalage est assumé est que dans certaines de ces pensées, la jeune fille critique justement la fausse autocritique, la fausse profondeur, qu'elle revendique elle-même des mises en abîme, etc.

Et le thème principal, derrière l'humour, je vois surtout la thérapie psychologique existentialiste dans le récit, à la manière de Sartre, de Camus ou du film Fight Club. Réflexion sur le sens de l'existence humaine et de ce qu'on peut faire pour se donner le sentiment d'être vivant.

Ça me fait aussi un peu penser au roman biographique de "Christiane F, 13 ans, droguée, prostituée". Dans les deux cas, récit à la 1ere personne du point de vue d'une jeune adolescente lucide vis-à-vis du monde con des adultes, et la tentation de l'auto-destruction comme quête de sens. ( Au delà, c'est clair que Christiane F est ennuyant, prévisible et mal écrit, et moins amusant, comparativement, mais je soulève juste les similitudes qui me frappaient )

Et d'une manière plus personnelle, faut dire que j'ai plein de références culturelles littéraires et cinématographiques en commun avec les deux narrateurs, alors ça créé forcément une complicité.. Par exemple le film japonais black rain (Kuroi ame), ça a été longtemps mon film préféré, et personne autour de moi ne le connaissait... Alors c'est interesant de tomber sur la même situation dans ce livre.

J'ai été agréablement surpris par ce livre. Surpris qu'on puisse parler de snobisme à son propos puisque c'est un best seller pas très réputé. Mais c'est un livre très délicat, assez perspicace et humain, et je partage beaucoup de points communs avec l'auteur, qui est une ancienne prof de philo (attirance pour le Japon, critique de la phénoménologie...).

Non, il est un livre facile à lire, et il y en a trop des clichés à mon goût … Il est bien sans plus…

Dans les premières pages on comprend comment est considérée et décrite l'intelligence des deux principaux personnages. Ça vaut la série Scorpion, il s'agit de lancer des mots qui sonnent compliqués pour donner un vernis d'intelligence tout en dénonçant que le drame de ces personnes est le vernis d'intelligence de ceux qui ne sont pas eux, et qui sont dépeints comme snobs.

Dans le livre de Martin Page "Comment je suis devenu stupide", le traitement de cette question est beaucoup plus intéressant.

To be continued...

Bonne synthèse Kolyma… Tu as raison…

Kolyma a écrit:Dans les premières pages on comprend comment est considérée et décrite l'intelligence des deux principaux personnages. Ça vaut la série Scorpion, il s'agit de lancer des mots qui sonnent compliqués pour donner un vernis d'intelligence tout en dénonçant que le drame de ces personnes est le vernis d'intelligence de ceux qui ne sont pas eux, et qui sont dépeints comme snobs.

Dans le livre de Martin Page "Comment je suis devenu stupide", le traitement de cette question est beaucoup plus intéressant.

To be continued...

Pas d'accord. Et quels mots compliqués? Quand elle parle de phénoménologie? L'auteur est une prof de philo, qui s'est sans doute fait plaisir en plaçant quelques uns de ses points de vue personnels dans le roman. Moi-même étant prof de philo, et appréciant peu ce courant de philosophie, j'apprécie.

Quelqu'un a lu "Comment je suis devenu stupide" de Martin Page ici ? (ça ne m'étonnerait pas trop)

Vous en avez pensé quoi par rapport à la façon de présenter les surdoués ?

@Lawrence : je citerai pour montrer de quoi je parle, bien que je ne doute pas qu'on ne tombera pas d'accord.

Merci, Belena.

Kolyma a écrit:Quelqu'un a lu "Comment je suis devenu stupide" de Martin Page ici ? (ça ne m'étonnerait pas trop)

Vous en avez pensé quoi par rapport à la façon de présenter les surdoués ?

@Lawrence : je citerai pour montrer de quoi je parle, bien que je ne doute pas qu'on ne tombera pas d'accord.

Merci, Belena.

C'est une question de ressenti, et je n'ai pas ressenti cela, à aucun moment. Donc il n'y a pas à chercher à me convaincre. C'est une question de goût. De même que je n'aime pas Houellebecq et que j'apprécie Carrère par exemple. Pour d'autres c'est l'inverse. Mais pour l'élégance du hérisson, je n'ai pas eu l'impression de niaiserie et de platitudes éprouvée à la lecture de beaucoup de contemporains, par exemple Jean D'Ormesson ou Foenkinos, pour ne rien dire de Coelho ou de Laurent Gounelle, d'une médiocrité inouïe.

Spoiler:

Dès la deuxième page, il y a un mot en latin : "hubris". C'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup.